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Le blog de Pressac sur France Inter

"C'est assez malin cette idée du blog sur ce château"... David Abiker, chroniqueur à France Inter  est tombé sous le charme du blog de Pressac, et surtout de son contenu. Découvrez ci-dessous sa chronique radio diffusée vendredi matin, très tôt, à 6h24, à l'heure où Pressac commence à sérieusement s'activer.

Ecoutez la chronique.

Jacques a les mains rouges et repousse Julia Roberts

Pas d'inquiétude ! Julia Roberts annoncée ... est simplement repoussée à demain ou après-demain ... Ce sera "selon" !
Etranges vendanges en effet que celles-ci. Le fax a fonctionné allègrement entre le laboratoire de Grézillac et Pressac. Estelle, venue hier comme prévu, a humé, regardé, goûté tous les moûts, en particulier les rouges. Et son diagnostic est tombé, posé et réfléchi, mais impératif et confirmé : il faut écouler.
Etranges vendanges donc : marc et jus ne seront restés ensemble que quatre jours contre de  quinze à vingt et un jours habituellement. Merci la sécheresse interrompue d'avril à aujourd'hui ; merci les hauts degrés déjà annoncés et confirmés ; mais, surtout, merci la qualité du raisin qui devrait permettre de faire un excellent vin ; n'est-ce pas là l'essentiel ?
Etrange journée également que celle-ci : je sors d'une cuve d'où, fourche à la main, je viens pendant une heure environ de jeter du marc dans notre pompe "queue de cochon" qui elle-même l'a envoyé vers la presse. Dans deux heures environ, je replongerai dans ce lieu étrange qu'est l'intérieur d'une cuve, remplie de l'humeur du vin. Jacques, les mains rouges : j'en suis fier. A ce moment là, ce temps là, la vendange reprendra ; il s'agit bien que ce soir la récolte des merlots soit achevée ce soir...avant la pluie annoncée.
Etrange journée, vous-dis-je. A l'instant, j'entends dans le fond, une machine à vendanger qui siffle et, plus prés, une presse qui tourne, le bruit de caisses qui sont posées sur le haillon d'un des camions de notre transporteur.

Aujourd'hui Pressac salue Pétrarque, demain ce sera Julia Roberts

Dans La Croix, un article d'Emmanuelle Guiliani qui présente l'exposition des "Trésors Cachés de l'Assemblée Nationale". Parmi les pièces exposées, outre, en particulier, des manuscrits de Rousseau, d'Hugo et de Lamartine, une édition "prestigieuse" de textes de Pétrarque. Je lis un peu après dans le Folio 4242 de Julian Barnes " Quelque chose à déclarer", à propos de l'ascension du Mont Ventoux : "Cette ascension devint dans l'esprit de Pétrarque une métaphore du voyage spirituel : c'est un effort incessant pour s'élever, et il n'y a pas de raccourcis." Pourquoi de la part de Pressac, ce salut à Pétrarque ? Tout bonnement, parce que l'un et l'autre sont "nés" la même année : en 1304 ; le 1er avril pour ce qui concerne Pressac ; le 20 juillet pour ce qui est de Pétrarque. Pétrarque est comme un jumeau qui nous parle comme un frère.

Coïncidence également, la carrière littéraire de Pétrarque couvre à peu prés les dernières années de la présence des Pressac à Pressac. Pétrarque fait donc partie de mes lectures, son "Canzionere" comme sa "Lettre aux Amis". En particulier grâce à deux éditeurs : Jérôme Millon et Christophe Carraud qui dans "Conférence" reprend fréquemment, entre autres, des textes de Pétrarque. Un autre clin d’œil à Pressac : Conférence se présente avec en tête une citation de Montaigne : "Le plus fructueux et naturel exercice de notre esprit, c'est à mon gré la conférence... La cause de la vérité devrait être la cause commune..." De Pressac, sa maison familiale, est sortie, un jour, Françoise de la Chassaigne, pour devenir Mademoiselle de Montaigne, Madame Michel de Montaigne. Est-il possible de dire merci et de se laisser saisir ? Jérôme Milon et Christophe Carruaud ont édité ensemble en 2004 un ouvrage hors commerce : "Pétrarque - septième centenaire - 1304 / 2004" Je le tiens d'un des libraires de Tchann, boulevard du Montparnasse. Ce jour, trois remorques et deux petites presses de Sémillon. La récolte des raisins blancs ets finie. Au boulot !

Des cuves et une question

Trois heures de remontage calmement effectués cet après-midi. Dehors le temps est gris ; un moment même il a plu, moins cependant que ce matin, ce qui a du gêner Christine, Jeanne et Henri et leurs amis du cycle de formation aux "procédures de la qualité" de l'Ecole de Management ( ex Ecole de Commerce) de Bordeaux, partis courir  dix kilomètres vers les 9 h 30 au bénéfice des Virades de l'Espoir.

Chaque cuve de raisin rouge a donc entamé sa course ; l'objectif : 999. A ce moment là, le sucre sera devenu de l'alcool. Ce soir, l'une dit  1065 et 21° ; la seconde 1073 et 20°; la troisième 1068 et 23° ; la quatrième, sinon la cinquième 1070 et 24°. Les températures sont probablement un peu basses. Du travail en perspective.

Pendant que les moûts s'écoulent, je lis "Le Goût de Budapest" de la merveilleuse collection dite "Le Petit Mercure" . Au bas de la page 108, sous la plume de Dezsö Kosztololanyi, je découvre : "L' Anglais avec un orgueil démesuré déclare : " Ma maison, c'est mon château !" Le Budapestois avec une égale fierté peut lui répliquer : "Mon café, c'est mon château !" Que dirions-nous ? Pressac s'interroge !

La fée du logis et Miss Mécano reçoivent de la visite

Un peu de flemme pour commencer cette journée et aussitôt après, vers 10 heures, début des remontages. Le dernier catalogue des éditions Eyrolles, reçu hier, nous a appris la récente publication d'un livre dénommé "Miss Mécano". Pourquoi ne l'offrirai-je pas à Geneviève ? Elle pourrait en contrepartie m'offrir "La fée du logis... Spécial Hommes" tout aussi récent.

Mêmes manipulations qu'hier ; même patience nécessaire. A 11 heures, arrivée d'un petit groupe de membres de l'Association Historique du Pays de Branne partis à pied à la découverte des trésors patrimoniaux des communes - "paroisses" serait plus exact - de Daignac et de Dardenac. J'explique Pressac, de Pressac avant Pressac au Pressac d'aujourd'hui. Un jour, je vous indiquerai l'adresse de notre site.
Maintenant, nous attendons notre nièce, Christine C. et deux de ses amis. Ils s'en viennent participer à Créon, bastide située à 7 kilomètres de Pressac et crée postérieurement,  à une course destinée à récolter des fonds pour lutter contre la mucovisidose. De Christine, je vous parlerai demain. Aujourd'hui comme demain, place aux remontages.

Travail ingrat et résultats invisibles

Cinq remontages des cuves de rouge le matin aussi longs que possibles ; cinq autres l'après-midi... dans chaque cuve, si ce n'est déjà fait, le produit oenologique recommandé, en particulier cette année pour combler le manque d'azote qu'indiquent à des doses très variables les analyses de Grézillac.
Brancher et débrancher les tuyaux, les nettoyer ; mettre à chauffer de l'eau , y incorporer à bonne température - ce qui veut dire patienter et attendre - "le" produit ... touiller, attendre, incorporer dans la cuve concernée, nettoyer les bastes, porter les échantillons à l'analyses, trouver au plus prés un joint de caoutchouc, récupérer les résultats sur notre fax.. recommencer et encore recommencer.

C'est le jour, c'est la nuit... Le ciel est plein d'étoiles, la nuit est belle. Pas de place pour le découragement. Pendant des jours et des jours , nous ne saurons rien...ou presque . Continuons. Heureusement, à 18 heures, arrivée imprévue de Sophie B., la filleule de Maman. Conseillère d'orientation dans les Hautes Pyrénées, elle arrive de Périgueux où elle a assisté à un colloque organisé par une association agrée par l'Education Nationale et s'en va vers les environs de Pauillac retrouver ses frère et soeurs. Une tasse de thé partagée, quelques biscuits mis à l'abri par Geneviève ; nous échangeons sur nos familles respectives. Sophie s'en va avec quelques bouteilles. La journée a sans doute été rude ; pourtant, nous sommes heureux !

Pas de Mercédés, pas de cigare, pas de "microoxigénation"

Estelle Dessup est un des dix ou douze oenologues du Centre d'oenologie de Grézillac, un des plus importants de France. Pas de Mercédés, pas de cigare, pas de "microoxigénation" ; un travail sérieux et rigoureux s'appuyant sur les puissants moyens d'analyse de son laboratoire ; une communication facile et immédiate si nécessaire.
Estelle avec laquelle Geneviève a noué des relations tant de respect que d'amitié va passer une fois par semaine, le mercredi matin, jusqu'au terme de la vinification. Estelle a d'ailleurs choisi d'exercer ses talents à Grézillac, après l'avoir fait pour le compte d'un négociant, car ainsi elle peut consacrer à de très nombreux vins et autant d'exploitations ses peines et soins. Son assistante, Annabelle Garçon, passera le lundi. Entre temps, autant d'analyses que nécessaires des moûts et vins seront effectuées et leurs résultats commentés transmis par fax.
Estelle et Geneviève : les yeux, le nez, la bouche. Des diagnostics bien posés . Des notes-consignes sur le cahier de vinification. Aussitôt après valsent là où c'est nécessaire les Thiazote, Actiflore C, Superstar, Zymaflor...  
Laffort : je me souviens de mes visites à cette entreprise du quai de la Souys à Floirac près Bordeaux vers ma dixième année. Mon oncle, José Gizard, viticulteur à Carignan et négociant à Bordeaux, y achetait au gramme les rares produits oenologiques dont il avait besoin. Si vous vous promenez dans l'actuelle cour de cette entreprise, vous y voyez aujourd'hui des colis prêts à partir pour l'Australie, la Nouvelle Zélande, les Etats Unis, le Chili... Vous rencontrez à son comptoir un viticulteur qui vient du Médoc, un autre de Saint Emilion, votre voisin peut-être. Laffort... je songe à Joseph Delteil, vigneron comme l'était Claude Simon m'apprend "Le Matricule des Anges" - "Soyez des anges : abonnez-vous " www.Lmda.net, et à sa "Cuisine paléolithique". Il est temps de remplir d'eau une des cocottes minutes du chai, de la mettre à chauffer, de brancher sur une des pompes les tuyaux nécessaires. Vendanger : Geneviève s'est organisée pour pouvoir consacrer plus de temps au travail du chai qu'à la récolte elle-même. Le raisin est important ; le vin plus encore.

Un bel effet de la sécheresse

8h 30, telle est l'heure du premier rendez-vous de nos vendanges 2005. Le brouillard de ce matin laisse entrevoir une belle journée . Alléluia . Les acteurs se concertent : Christian Brois, entrepreneur charentais de toutes sortes de travaux agricoles, dont la douce machine vendange Pressac depuis 8 ans maintenant, Dominique qui assure sans faille et avec délicatesse la conduite des tracteurs et de leurs remorques, Fernando et Geneviève qui mènent le chai, la réception du raisin comme la vinification. L'équipe est resserrée et efficace : elle oeuvre ensemble depuis plusieurs années. Ses réflexes sont au point ; la confiance mutuelle est éprouvée. Pour ma part,  à cette heure, j'achève un séjour parisien de quelques jours pendant lequel, avec joie, j'ai pu livrer plus d'une caisse. Une fois pour toutes, je me suis attribué des tâches de logistique élémentaire, sinon de complément. Ce matin donc, parceque j'en ai reçu la permission, je ne suis pas indispensable ! 9 h 30, le premier tombereau de muscadelle arrive au chai. La beauté du raisin était connue : splendide ; il demeurait un doute sur le jus ; il est vite levé. Voilà un bel effet de la sécheresse. 10 h 30 : second tombereau ; la première presse de blanc 2005 est lancée ; nos vendanges démarrent vraiment.

Et pendant ce temps là, Christian Brois patiente

Les chais ne sont pas indéfiniment extensibles. Geneviève a donc choisi de céder une large partie de sa production de Bordeaux Rouge 2004 pour bien loger sa vendange 2005. Ce jour est donc jour de ronde de semi-remorques . Dés qu'une cuve se libère, Fernando, en bottes et ciré, s'y précipite, la nettoie et la prépare. Travail apparemment simple, mais qui doit être effectué avec beaucoup de conscience : la propreté est la première exigence de la qualité. Alors Fernando gratte, frotte, brique... plus encore qu'une maîtresse de maison.
Et pendant ce temps là, Christian Brois patiente. Christian Brois : il commence sa saison en labourant, souvent dans le nord de la France ou en Beauce ; ensuite ou en même temps, il sème parfois dans une de ces régions, parfois ailleurs ... du maïs, du tournesol, du blé, de la vesce.... c'est selon ; mais il enchaîne. Un peu de repos, puis vient la préparation de ses divers engins de récolte ; quand il nous arrive en septembre pour vendanger, il a déjà ramassé trois à quatre céréales et autres. Après Pressac et quelques propriétés voisines, solidement attachées à lui et à son efficacité, il s'en ira vendanger en Charente, dans ce cas à une autre vitesse et avec d'autres moyens. Sa "troisième " saison s'achèvera avec la récolte des betteraves. Peut-être avez-vous lu Braudel et son "Identité de La France" ? Christian Brois la vit plus qu'activement, même s'il ne s'en doute pas.  Et il l'aime.

"Tous les méchants sont buveurs d'eau ... C'est prouvé par le déluge !"

Entendons d'abord la pensée du jour du nouveau collaborateur providentiel de Pressac, mon frère  : "Tous les méchants sont buveurs d'eau ... C'est prouvé par le déluge !" Tout le reste est la répétition du premier jour : le  beau temps, l'arrivée des remorques, le remplissage de notre presse hydraulique, l'envoi du jus vers les cuves, le vidage de la presse, son nettoyage attentif et celui de tous nos autres outils.
André, à ton tour de paraître. Connaissez-vous l'hydrogéologie, l'Ecole des Mines, son laboratoire spécialisé de Fontainebleau. Savez-vous la multiplicité des travaux qui y sont menés, à l'aide aujourd'hui d'un des outils informatiques les plus puissants qui permet la saisie de multiples données et l'élaboration des modèles les plus complexes. Savez-vous l'efficience mondiale de ses chercheurs en même temps que leur modestie et leur humour. Allez sur un quelconque moteur de recherche, Google ou Voilà, appelez André Levassor. Peut-être aurez-vous envie d'accéder aux quelques neuf cent pages qu'il a consacré, à la demande de différentes autorités publiques, au bassin de la Seine et à son aménagement ? Un hydrogéologue dans un chai, c'est un bonheur de tous les instants. Mais après tout, n'y a t'il pas 88% d'eau dans le vin ?